La Petite Sorcière

De son étymologie latine sortiaris, “diseur de sorts”, la sorcière possède une identité forte, influente et mouvante depuis la nuit des temps. Divines magiciennes telles Circé et Hécate dans la mythologie grecque, persécutées et chassées dans l’Ancien Régime, protagonistes dans la littérature gothique, les sorcières n’ont jamais laissé indifférent. Figures politiques et féministes à l’époque des suffragettes, les sorcières symbolisent aujourd’hui l’émancipation des femmes, la lutte contre le patriarcat et la puissance de l’énergie féminine. Elles ne sont plus associées aux vilaines femmes comme cela a pu être le cas dans le Magicien d’Oz de Lyman Frank Baum ou dans Blanche-Neige des frères Grimm. Les sorcières modernes sont courageuses, intelligentes, indépendantes, engagées. C’est le cas d’Hermione Granger dans la série littéraire Harry Potter de J. K. Rowling ou de Sabrina Spellman, l’apprentie sorcière de l’éditeur Archie Comics, devenues de véritables héroïnes de la culture populaire, inspirantes pour de nombreuses jeunes filles.

Dans cette nouvelle série intitulée La Petite Sorcière, une jeune fille aux traits encore enfantins est mise en scène dans une atmosphère sombre. Les contrastes mettent en lumière l’ambivalence de l’identité du personnage principal. Le rouge de ses lèvres et le blond incandescent de ses cheveux, la blancheur de sa peau et la noirceur de son vêtement s’opposent. Son familier, ou daïmon comme le nomme Socrate, est un chat blanc qui se détache du tradionnel chat noir. Ces dualités, propres à l’adolescence, illustrent l’entre-deux mondes dans lequel se trouve l’être en devenir. 

Au fil des photographies, la présence maternelle s’impose dans le cadre avec une discrétion anonyme, néanmoins sévère et stricte. Le spectateur entre dans l’intimité familiale en mouvement. 

La position de la jeune adolescente évolue au cours de la série. Sa lumière transperce, par sa pureté et par la mélancolie juvénile de ses yeux clairs. Souvent, ils sont francs et se portent avec intensité sur autrui. Les jeux de regard s’entremêlent, ils sont voilés, dévoilés, reflétés. Ils sont successivement entre la présence et l’effacement, entre le pouvoir et la soumission. 
C’est l’histoire de la quête identitaire, du devenir femme, de la recherche d’une place d’égale à égale.

La Petite Sorcière est une ode à l’énergie féminine qui fascine à travers les cultures et les époques. Elle symbolise toutes les femmes en devenir, fortes et libres.

©2023 Julie Mahault
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